Chère Eudo,
Cyrien voulait connaitre ma position par rapport au conflit constant qui oppose le peuple à ses dirigeants. Sa préoccupation est bien embarrassante, car tous les penseurs ont théorisé le peuple comme étant la source de tous les pouvoirs, mais oubliant que toute société est un mur dont une face constitue les devoirs et l’autre les droits. Citoyens renvoie aux individus qui sont soumis aux lois et aux institutions de l’Etat, à qui il est reconnu également des droits et des libertés, à qui les gouvernants sont directement responsables. Voici donc ma réponse à ce jeune homme :
La notion de « peuple » est souvent utilisée pour désigner l’ensemble des individus qui composent une société ou un Etat. Cependant, cette notion est-elle suffisamment précise pour refléter la complexité et la diversité des relations entre les individus et l’Etat ? Doit-ont continuer, sous le prétexte du « nationalisme » ou de la « souveraineté », à participer à la violation des droits du « citoyens » ?
En réalité, le terme « peuple » est trop vague et trop général, car il ne prend pas en compte les spécificités et les différences individuelles. Il ne s’appuie pas sur le principe de droits et de devoirs de chacun et de tous qui sont les fondements de toute société. Il peut également être utilisé pour justifier des décisions politiques qui ne sont pas nécessairement dans l’intérêt de tous les individus qui composent la société.
Mais plus grave encore, l’utilisation du terme « peuple » peut avoir des conséquences pernicieuses. Elle peut créer une confusion entre l’intérêt collectif et l’intérêt individuel, et rendre les citoyens impuissants face aux décisions politiques. En effet, nul ne peut individuellement parler au nom du « peuple » et être écouté, à moins de faire partie des gouvernants ou de leurs alliés. Généralement, le peuple ne sert qu’à octroyer les mandats électifs à des individus qui se présentent à lui, lui font la cours par des promesses difficilement réalisables.
Cela conduit à une situation où les citoyens sont réduits à une masse anonyme, sans voix ni influence réelle sur les décisions politiques et les dirigeants à qui ils ont confié leurs pouvoirs. Les gouvernants peuvent alors utiliser le terme « peuple » pour légitimer leurs décisions, sans avoir à rendre compte à des individus spécifiques.
En revanche, le terme « citoyens » met l’accent sur l’individualité et la spécificité des droits et des devoirs de chaque personne. Il reconnait que chaque individu est un acteur à part entière dans la vie démocratique, avec des droits et des responsabilités qui lui sont propres. Si l’individu est soumis à des devoirs vis-à-vis de l’Etat, il est également bénéficiaires des droits inaliénables. Quiconque se dérobe de ses devoirs s’inscrit en porte à faux des normes de l’Etat et doit être écarté, sans qu’il n’exerce une quelconque résistance pour se maintenir.
En utilisant le terme « citoyens » plutôt que « peuple », nous pouvons mieux refléter a complexité des relations entre les individus et l’Etat. Nous pouvons également promouvoir une vision plus inclusive et plus équitable de la citoyenneté et respecté dans sa singularité. Voyons à quoi renvoie la notion des droits et des responsabilités du citoyen envers l’Etat et la société :
- Le droit de vote et de participation à la vie politique ;
- Le droit à la protection de l’Etat et à la justice ;
- Le devoir de respecter les lois et les institutions de l’Etat ;
- Le devoir de contribuer à la vie publique et à la société.
En fin de compte, la substitution de « peuple » par « citoyens » peut contribuer à renforcer la démocratie et à promouvoir une société plus juste et plus équitable où la réédition des comptes n’est plus un mythe, où les représentants désignés deviennent, par l’obligation des devoirs, des serviteurs honnêtes et moins prétentieux, sans prétention de s’émanciper de l’autorité des citoyens.
J’espère, chère Madame, que tu sauras apprécier mon opinion et la prendre e compte dans tes réflexions, la partager avec des amis afin que chacune mesure le fossé qui existe entre les concepts « peuple » et « citoyens ». Je devrais faire suivre cette réflexion d’une autre portant sur la refondation de l’Etat. Je ne sais pas si tu peux déjà avoir une idée de ce que je recherche.
Cordialement,
MOMOKANA Augustin Roger